Fabian Emmenegger est chargé des relations publiques et de la communication auprès de Save the Children Suisse. Récemment, il s’est rendu récemment au Malawi pour un voyage de presse. Dans cette interview, il parle de la visite de projet qu’il a effectuée et ce que cette expérience lui a apporté également d’un point de vue personnel.

Monsieur Emmenegger, vous étiez au Malawi. Qu’y avez-vous fait, et que fait Save the Children dans ce pays?
Ma visite concernait le suivi d’un projet sanitaire dans des écoles des districts de Zomba et de Machinga. L’objectif est de dépister et de traiter suffisamment tôt les cas de paludisme chez les écoliers. Dans le cadre de ce projet, Save the Children forme les enseignants des écoles qui ont été choisies, afin qu’ils puissent eux-mêmes identifier les symptômes de la maladie, établir un diagnostic, mais aussi traiter les enfants malades. Du fait que nous réalisons ce projet dans des écoles, nous pouvons directement répondre aux besoins des enfants. Par exemple, ils reçoivent le diagnostic dans les 24 h suivant le test de dépistage, et peuvent être aussitôt traités de manière ciblée ou, si leur état de santé l’exige, être transférés dans un hôpital. Cela permet en outre de nous assurer que les enfants se rendent bien dans l’établissement prévu et ne restent pas simplement chez eux. Mettre en œuvre des mesures de prévention du paludisme dans les écoles est également profitable pour l’éducation des enfants: comme ils peuvent retourner à l’école plus rapidement après leur traitement, l’absentéisme scolaire diminue et ils ratent moins de cours. Ainsi, nous faisons d’une pierre deux coups!

Un autre aspect important de ce lien entre la santé et la formation est que, jusqu’ici, le paludisme a, certes, pu être endigué chez les enfants de moins de cinq ans, mais que les plus âgés n’étaient pas vraiment pris en compte – or, eux aussi souffrent énormément de cette maladie. Nous pouvons accomplir une tâche importante en opérant de manière ciblée dans les écoles primaires.

Ce projet a l’air très convaincant. Quelles ont été vos impressions sur place?
Il ne faut pas oublier que le Malawi est le troisième pays le plus pauvre du monde. Bien souvent, il manque de tout.

Ce qui m’a le plus frappé, c’est la chaleur accablante qui règne – on a de la peine à se l’imaginer. Les établissements scolaires sont équipés de façon très rudimentaire. Il n’y a quasiment pas d’ombre, et, dans une école, on compte environ 2500 enfants pour 40 enseignants. De telles conditions sont impensables pour nous – et, en plus, la salle dans laquelle les cas de malaria sont traités est minuscule. Tout cela m’a beaucoup préoccupé.

En revanche, j’ai été très positivement impressionné par l’engagement sans faille des gens qui travaillent pour Save the Children sur place. Leur conviction et leur dévouement m’en ont imposé. Cela fait plus de six ans que ce projet existe et qu’ils procèdent par petites étapes pour réaliser l’objectif visé. Cela suppose d’innombrables négociations avec les responsables du district, des chefs tribaux, du gouvernement, du ministère de la santé et de l’éducation – il y a tellement de services qui sont impliqués et qui doivent être coordonnés! Malgré cette tâche fastidieuse, nos collaboratrices et collaborateurs sont toujours très motivés et peuvent d’ores et ont déjà pu enregistrer les premiers succès. Un médecin de l’hôpital nous a, par exemple, raconté qu’il ne recevait pratiquement plus d’élèves atteints de paludisme provenant de l’école que nous avons visitée. Dans un autre district, le gouvernement a commencé à financer lui-même les médicaments. Cela permet d’atteindre l’objectif de Save the Children à long terme, à savoir de nous retirer et de céder aux autorités le suivi des structures mises en place dans tout le pays. Ce ne sera pas chose facile, mais c’est l’objectif que nous nous sommes fixés, et cela nous permet de réaliser des tas de choses pour améliorer la santé de ces enfants.

Nous pouvons faire beaucoup à long terme pour la santé de ces enfants

Fabian Emmenegger PR & Communications Manager, Save the Children Suisse

Qu’en concluez-vous?
Le paludisme est une maladie endémique au Malawi, dans toutes les parties du pays, et donc l’une des principales causes de décès pour les enfants. Le fait que les choses bougent et que notre travail aide directement les enfants concernés me remplit d’espoir. Certes, dans le district de Zomba, Save the Children continue pour l’instant de financer tout le matériel, mais comme cela devrait bientôt changer, nous pourrons nous concentrer sur la formation des enseignants, ce qui aura d’autres effets positifs pour la santé des enfants. Les professeurs que j’ai rencontrés étaient tous très motivés et se réjouissaient de pouvoir aider les élèves. C’était incroyable pour moi de voir que nous pouvions faire bouger les choses pour ces enfants. C’est une expérience inoubliable.

Quel était votre rôle dans cette visite de projet?
Nous étions là-bas avec deux journalistes pour un voyage de presse. J’avais conçu au préalable  un programme à cet effet avec des collaboratrices et des collaborateurs de Save the Children au Malawi et, lors de la visite, je me suis assuré que les journalistes pourraient avoir une vue d’ensemble du projet. Il s’agissait de reconstituer l’histoire d’un enfant qui arrive à l’école, qui ne se sent pas bien, qui subit un examen et est traité, puis transféré à l’hôpital, afin que les lecteurs puissent aussi comprendre ce processus.

Votre visite a-t-elle modifié votre vision de cette maladie?
Oui, énormément. Ce n’est que sur place que j’ai pris conscience de l’omniprésence de ce problème. Le paludisme est la principale cause de décès chez les enfants; presque tous ont déjà été atteints ou connaissent quelqu’un qui en souffre, et ils ont déjà perdu des membres de leur famille. Je ne l’avais pas réalisé auparavant. En Suisse, nous ne connaissons pas une telle précarité. Aussi le fait que je peux tout simplement prendre un médicament quand je suis malade, tandis qu’au Malawi, tellement de gens meurent de cette maladie… C’est difficile à admettre. Notre projet constitue un bon début pour modifier l’approche de la maladie. C’est vraiment une belle initiative. Mais il faudra travailler encore beaucoup pour changer les mentalités et juguler cette maladie.